Archives des articles tagués douleur

0.

je lis l’avenir dans les cicatrices
ligne de désir
goutte entre les seins la main
plaque la douleur rose
spirale

ma vie à l’arrache
des drains saisissent
mon cœur armoire
y glissent
un glaçon mécanique

tout court un rien
entre deux coups
la soif pointille

comment mesurer le temps sinon
que par l’espace qu’il prend?

5.

vers
quelque part
et ton cœur
travestir miron
en une échappée

dresser ma poitrine flèche
sutures à plumes
mon moteur d’ariane
rêve de trente heures
anesthésiées

l’amour rouge uppercut
au souffle court
je fuirai encore mais
serai facile

à réparer

10.

je lis l’avenir dans les rimes turques
bpm externe
j’abats ru sur roue sous
les ornières
je sais ce qu’elles chantent

les mouettes portent
la nostalgie du bosphore
au saint-laurent
mon plexus éblouit
des masses de vapur

tous formés de lignes
avançons     les miennes
profondes plus
apparentes que

mes trajets au front

15.

ce n’est pas une guerre
secondes      contre cœur
c’est le vertige
des chambres plus grandes
que réveil

au pays de l’autre
apparier mes cicatrices
aux doigts déclencheurs
courbes sur verre boire
à ma santé

sans la peur de la mort
où est l’avenir?

on m’implante une racine
je cherche encore
son arbre centenaire

20.

*** Suite (et fin) à venir. En attendant, un poème inspiré de la poésie de Françoise Collin qui vient de paraitre dans le fabuleux all-star numéro de Françoise Stéréo. ***

quelque part un poing sous l’omoplate tu échafaudes des noeuds des théories destructivistes
les respirs en branle les combats sous l’aileron les gélules en petits paquets de toi
avalés
tu touches du doigt le spasme tu le serres non c’est le spasme qui t’agrippe ne résiste pas
fais-toi dire des phrases trop longues camoufle les pauses sur ta corde les endroits à mâcher
déglutis
quelque part mais pas couchée surtout pas en mouvement vers le coucher les serres du rêve
autour de ton cou tu grapilles les vêtements que tu peux le port que tu peux tu l’atteins
intègre
la descente en rappel cet acte manqué déchirure du tendon cuir qui t’est cher laisse les bras
tomber. ne revole pas, n’éclate surtout pas, tiens-toi en un seul morceau. une seule dimension
comprise
les rires ne te blessent pas ce sont des beignes qui rebondissent des vertèbres lousses de la molle-mère
mais le clou qui glissera de l’échafaud tu le connais d’avance tu le figes en place il sursaute
rasséréné.

IMG_7753.JPG

temps, autres moeurs
comme entrée en matière
papier plastique ampoules
et vitamine E en couches blanches sur
les bobos de deux semaines, un mois
traces de journaux intimes
indélébiles dans le recyclage

tu penses que tu as assez déchiré
de mots en leur plein coeur
mais tu continues à rapetisser
tout sauf les muscles de tes épaules
taillés exprès sur le bottin
le fond de tes armoires blanc
comme une camisole au vent

comme un de ces journaux que tu n’as pas su
meurtrir avant de redonner piteux
neufs après cinq déménagements
tu as de l’expérience vois-tu
en ramassis en classage poubelle
ou recyclage recycler c’est poser
un geste ça tu le sais bien

toujours trois sacs par semaine ça
parait pas les trous dans les meubles
tu ronges ta vie de papier tu fais
du vide pour une autre après
ventilo courir après des parallélogrammes
cartonnés surlignés jaune rouge
mottes de poils ça ça se recycle pas

les deux mains dans le vide
tu te demandes pourquoi ne pas
avoir retourné tes armoires
direct dans le sac blanc
fouillé dans la transparence
pêché le compte d’hydro impayé
à la pince à épiler

l’épuration totale mardi matin
sortie complète des matières
enterrables sans remords
papier plastique verre
appareils en fouillis sur les bras

ton casse-tête 2005-2010 pièces
dans les mains d’un badaud peut-être
épuré

20140615-210342-75822080.jpg

Le coeur à ciel ouvert.
Le coeur, ce malaise incessant.

Le coeur, cause à la fois de cet étranglement et de ma vie.
Le coeur, ce ramassis de déchirures.
Le coeur qui bat deux tempos différents. Le coeur pluriel.
Le coeur, (le coeur), …, le c-c-coeur, (le coeur).
Le coeur et sa demi-pilule rose quotidienne.

Le coeur, as-tu aimé?
Le coeur, ce ramassis de déchirures.
Le coeur qui brise par en-dedans. Les éclats des côtes qui encaissent.

Le coeur et sa nausée. Le coeur et ses lèvres.
Le coeur qui tire jusque dans le bas du dos.
Le coeur, raison et victime des élans catastrophiques.

Le coeur sous la main.
Le coeur qui survit comme un grand.
Le coeur qui passe à travers le corps.

Le coeur en fumée.

20140309-173544.jpg

Ce poème est un ramassis (augmenté) de tweets sur le coeur, composés une nuit de mal de coeur, entre le 7 et le 8 mars 2014.

Ce moment où tu prends une gorgée et ne chokes pas
ton moment avec toi-même
ta feuille empruntée
ta capacité à réfléchir
les lanternes à ta surface

tu es une gorge profonde
un puits aux parois rocheuses
mousseuses
presque moelleuses
selon la saison
tu acceptes

ce moment où tu relies les couleurs entre elles
d’une coulée de bouette sous les feuilles
au bec de ta théière
tu collectionnes les tons d’orangé
et les nuages complémentaires
tu réfléchis
les sourires sur tes lèvres

tu es une langue de feu
plus ou moins vivante selon la pluie
et le vent qui t’anime
le matin ou le soir
tu acceptes

ce moment où la douleur se raccroche à toi
comme à un tronc d’arbre salvateur
tu touches du bois
sans le vouloir
tu traces sur l’écorce quelques mots
un sacre dans la terre

tu revoles

tu es aux commandes malgré le saut
de quelque chose d’intangible
ton souffle reste à la surface
des cascades
des bougies
et balaie ta tasse de thé
avant que tu ne deviennes

l’automne
et toi
dans ton corps en jeu.

*Photo instagrammée*

Je ne serai pas tranquille tant que je n’aurai pas tout avalé : mots, heures d’éveil et de sommeil, morceaux de trottoir râpeux comme une pilule de trop l’été.

Je ne serai pas tranquille tant que je n’aurai pas tout avalé sauf la pilule.

Je voudrais être déjà guérie sans même avoir pris la moindre croquée de médicament. Sans avoir pris la moindre croquée de douleur. (Puisque, semble-t-il, il faut en profiter. À moins que ce ne soit l’apprécier? Le verbe m’échappe alors que la douleur… non.)

Que faire de l’attente? Que faire des trous entre? Qu’est-ce qui est un trou et qu’est-ce qui n’en est pas un? Est-ce qu’un trou est forcément vide?

Ma vie ne l’est pas. Elle est pleine de toutes ces petites impatiences, les fesses douloureuses des chaises, à me peindre des faux-feelings sur le corps du type : I feel left behind, I feel ignored, I feel disrespected, I feel emptied. Je me sens sac, je me sens sale, je me sens la tête en bas.

Le trottoir est proche, donc, et parfois, c’est un bon remède contre le mal de bloc. Ça s’appelle l’homéopathie en grande quantité. Comme combattre un élément (ex. : le chaud) par ce même élément (ex. : le chaud). Ou encore l’homéopathie par l’homéopathie… Non, ça marche pas tout à fait.

J’ai la tête dure et la journée dure à boucler. Mon quotidien est une séquence de choses à avoir faites liées par des marques de frustration.

Des marques de dents? J’en doute. En général, j’avale mes pilules, ça passe plus vite.

Bonne digestion dans le noir.

Le Japon m’est rentré dans le ventre comme un coup de poing. Les yeux pleins d’eau, le corps plié dur, j’ai marmonné : « Ça y est, l’année s’annonce cinglante ».

Jusqu’à maintenant, on m’avait épargnée, croyant peut-être que mes papilles américaines ne seraient sensibles qu’aux subtils steaks hachés, oeufs et tranches de pain blanc. Résultat : je pensais que seuls les gens autour de moi avaient changé. Ah, et que les portions avaient rapetissé. Tout comme mon estomac, malmené par les changements de pression en et hors vols.

De toute façon, même si j’avais pu manger, tout me glissait des baguettes, tellement elles partaient dans tous les sens. Et des morceaux d’oeufs crevés, repris puis retombés – pas toujours à l’intérieur de l’assiette -, cela ne m’appétissait guère.

Mais voilà que mon assiette brillait de feux d’écailles et d’huiles de poissons : on me servait des sashimis, enfin! Si je plissais assez les yeux, je pouvais les voir se dandiner et lancer leurs éclats comme des avertissements.

« On ne regarde pas d’anime en mangeant! », ai-je mis dans la bouche de ma mère d’accueil, qui fermait la télé afin que nous ne soyons pas stimulés autrement que par le contenu de nos assiettes.

C’était en 2002. Ma digestion ne serait plus jamais le même.

Chaque morceau laissait une longue trace fraiche, de la langue jusqu’au fond de l’estomac, où il serait tombé en laissant entendre un « poc! » peu ragoutant s’il n’y avait pas eu la brulure.

Le poisson cru s’était introduit en moi pour me rappeler à la fois mes origines fluviales et mon exil insulaire; et à la dure, il m’avait donné le gout des choses délicates, desquelles je ne pourrais plus jamais me passer.