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J’ai pas que perdu ma France; j’ai aussi perdu une stabilité, une prise sur le sol ambiant, un peu de souffle aussi. Je suis entrée dans un labyrinthe de couloirs, j’en suis ressortie avec une poignée de sureté qui ne dure que le temps d’une avalée.

Gulp. Ce son dans ma gorge, cette trace d’amertume sur ma langue : la culpabilité d’être malade?

J’ai le vertige d’être si haut, plus haut qu’un arc de triomphe, la tête penchée et secouée par les tours du vent de Montparnasse. Non, ce n’est pas le vin; mon coeur se serre à l’idée d’y gouter, je panique à l’idée de gouter, de quoi que ce soit.

Le voyage part. L’autre départ arrive. Le tournis n’est qu’un symptôme.

Mais quand même le coeur de soi tangue, on ne peut que s’agripper à la rambarde, prendre un grand coup d’eau salée, et se souhaiter le meilleur.

Et si on tourne la tête, on voit les meilleurs des amis, secouant des mouchoirs pour soi. Et on se dit que le parcours est balisé, après tout.

Il n’y aura pas de chute.

With a different year in mind goes Darren Hayes’s song, a year I wasn’t even born. But in 1999, I was, and let me dive back into this year, the one that followed the year the best music was released (according to me). Let me recall the musical times I had back then.

(This poem was prompted by dVerse Poets Pub – thanks to Shawna.)

Stained with bubble gum landscapes
tying friends together like dolphins on a chain
we carried on dancing like we had nothing else but
the same music over and under and in

side by side
hand on hand
studying hyperballad phonetics
under our newly coffee-stained breath

stained
was our word full of promises
I could never blow balloons but I tried hard I swear
I sweat
at the thought of pink sticky matter exploding on me

and keeping me from understanding
Koi
Eifersucht
Karma
from holding back the years
yet

« What kind of monster would I be able to release? »
I rushed as music found a circular space
in our already hardened mind.

2011, l’année des migraines en crescendo et du corps en crise.

(En crisse? Aussi, sans doute.)

Je n’ai pas envie d’en faire un bilan. Pourquoi? Parce qu’il tiendrait dans deux lignes et quelque, que voici :

« Retour du Japon. Travail dès lors, dans mon domaine, avec superbes rencontres et fatigue infinie. Amours quand le temps le permet. »

L’an dernier, j’étais coincée au Japon pour célébrer dans un temple glacial. Je m’étais promis de célébrer seule l’année suivante, afin de répéter une expérience exquise que j’avais eue en 2010.

Cette fois, alors que j’avais oublié cette « résolution » – comme c’est la norme -, la force des choses m’a clouée au lit pour me la crier au visage. La migraine m’est passée sur le corps en entier – a rasé ma moitié de lit. Voilà le moindre son insupporté par mon système, surtout celui produit par une voix humaine plus aigüe que la mienne. Que celle qui joue dans ma tête, en tout cas.

Progressivement, tandis que le café et les Advil liqui-gel font effet, je me permets d’être contente de mon sort. Tout le monde parti fêter, j’ai la maison à moi même si je ne peux danser. N’est-ce pas ce que j’avais souhaité?

2011, retorse jusqu’au bout. Tu as fini par me donner ce que je voulais, mais en me faisant passer par les chemins bouetteux, de sorte que je peux même pas me plaindre.

2012, je te demande rien, comme ça j’aurai le droit de chialer.

Mais avant, je prends une petite année pour me reposer. Je pense que je le mérite bien.

(Comme vous tous, d’ailleurs, qui prenez le temps de lire mes états d’âme énigmatiques. Je vous souhaite pas ce que vous voulez en 2012; je vous souhaite rien. Comme moi, vous aurez sans doute quelque chose à la fin.)

Vous attendiez du frais, vous en aurez, même s’il ne sera malgré tout que du réchauffé. J’ai décidé de recycler mon article le plus populaire, celui sur lequel tombent tous les infortunés qui googlent « noel hemisphere sud », à la recherche d’information véridique : voici.

Je l’actualiserai tellement que vous n’y verrez que du feu. Sérieux, vous aimerez, tout comme moi, faire un retour dans le temps pour voir où était cet avant-Noël passé.

Go.

Sérieux, on s’y croirait, dans l’hémisphère Nord. Une promenade de magasin en magasin sur les plateaux sous le soleil pétillant, et me voilà bien gelée. Charriée. Puis, finalement, dans un autre port.

(Je sais que ça ne fait pas très sérieux de commencer un article par “Sérieux…” Les probabilités que le mot suivant soit “doude” sont élevées. Mais ne vous inquiétez pas, je ne suis toujours pas rendue là. Enfin presque.)

Une semaine avant Noël 2011 à Montréal : -15 degrés sous le soleil ; une visite de 25 boutiques dont le Mondou (le chat au ventre en l’air, souvent ronronnant, si accueillant à l’entrée de mes bottes renversées, est désireux de se faire faire un cadeau) ; deux lattés dans une boulangerie avec vue sur un tas d’îlots de cuisine industrielle et de robots nippons ; un déambulage à pas de chats dans la ruelle glacée et un captage de bas à l’appareil iPhoto ; une erreur de jour qui me fait croire trop tard que nous sommes samedi alors que c’est dimanche ; un souper de pizzas réchauffées (boulange chaude pour mon estomac) et de gâteau pas gouté ; une radio sur le divan comme une île dans une mer froide ; une révélation.

Oui oui, j’ai bien dit une révélation. J’ai compris ce qui m’anime, ce qui fait ma particularité, ce qui pourrait être mon middle nom si la loi le permettait : Dimanches. Avec un D majuscule. Hé oui, je suis une profiteuse pur-sang. Mes dimanches préférés ne sont qu’une accumulation de courts moments, de prises de conscience inespérées, de tweets isolés, de trouvailles improbables, de tasses de plaisir. Pour moi, attendre le dimanche est difficile ; je commence immanquablement à imaginer un ou deux détails que j’ai glanés dans un des dimanches précédents et qui, pour moi du moins, suffisent à rendre à l’attente de la beauté toute son importance.

Cette révélation m’est venue alors que je prenais une photo de trois bas. En fait, je cadrais les bas en plein centre, et ces seuls bas évoquaient le plaisir simple de Noël. La lumière aussi. Parce que cette charmante mise en scène de trois bas rouges suspendus à une corde à linge suffisait sans doute à donner à une poignée de grands enfants ronds des expressions faciales étonnamment simplistes.

Cette révélation s’étire, reste dans mon esprit sous la forme d’un rayon de chaleur que j’aimerais qu’il s’éternise jusqu’à minuit. Elle me fournit le fil conducteur de bien des écrits.

Une image s’impose à moi alors que je vais regagner ma chambre froide : une rangée de verres de vin, de gros ballons rouges sur un fond sombre, qui garderont leur chaleur jusqu’à ce qu’ils fassent doucement sombrer les grands enfants dans le rêve du prochain dimanche.

Tonight I needed to start on a quote (Interpol, Memory Serves). Memory serves me, and I’ll wait to find if it serves you too.

I don’t know how my soul is served when I drench it back with the Sea of Japan, my own see of Japan, that is to say a cover. A crossover. A mix of filling music, and quenching readings. Quenching livings.

My stay was a whole lack of words.

Now I’m listening to its echo, glistening echo. And as I somehow feel it has come to a halt, I remember again, buckling up all these wineful tears. A bucketful of these.

Music serves me: It triggers a reaction in my soul, the same as I used to have. A reaction in my soul, the same as I used to. Have. An unused word.

A little more wine. A little more food. All the same, you fool. Me fool.

The bucket is not full to the rim yet. Try it on, cry a little faster, cry a little further, down to a place where there’s nowhere to stay.

How can a music crave its way so hard to my heart? How can I love so deep that a whole country in me shakes? How can sounds can move my body to a place it doesn’t belong to at all? How… can you love this shakiness in me?

How can I still be chasing my damage at the same tunes?

Maybe because it raised me.

Vous vous rappelez cette mode de mettre « attitude » après n’importe quel nom-anglais-utilisé-comme-adjectif, mode lancée en France, là où c’est tellement plus trendy d’afficher que t’es hype dans une langue – pas la tienne?

(Sans rancune, les Français, je vous aime, même les Parisiens. Surtout les Parisiens, en fait, depuis que j’y ai habité et fait du vélib’ avec un verre dans le nez.)

Ben moi, non seulement j’me la rappelle pas, mais j’me rappelle pas non plus ce que je disais deux paragraphes passés. J’me rappelle pas, j’me soule. 

Je me soule quand la vie me soule pas assez. Quand elle m’envoie pas assez de notes, de groove, au nez. Quand elle me retape sans cesse les mêmes films travaillés au Instagram, les mêmes Chardonnay extra beurre.

Un verre à la terrasse des Cavistes.

Me semble qu’y avait ni Earlybird ni beurre dans la recette d’origine. M’enfin. La version instagramée existe toujours.

Pourquoi le vin me rend-il instantanément nostalgique? Il me rappelle Paris, sans doute. Celui des pires bouteilles à deux euros, celui de l’insouciance, celui des sourires sur les photos.

Mais aussi, à bien y penser (autant que cela m’est possible avec ces bubulles envahissant les neurones restant), le Paris d’une détresse certaine, d’une certaine amertume. 

Tant pis : on prendra du blanc, question d’éviter l’astringence. Du coup. (Je suis pas arrivée à le placer dans la phrase celui-là. Je l’ai mis à l’extérieur, question que vous ne puissiez l’ignorer. Paris abhorre l’indifférence, en même temps qu’elle la cultive.)

Et si la nostalgie était acide, comme un traitement argentique qui fixait dans le temps, comme une lime qui figeait dans les dents? 

Cette douce mélancolie que je traine est peut-être celle de la poète. Celle qui se traine d’un café à l’autre pour un verre de sancerre, une clope, un booking. Cette mélancolie, j’apprends à l’apprivoiser, à lui laisser prendre l’air et déverser ses flaveurs. 

Si je ne me rappelle plus le propos de ce texte, je me rappelle toutefois que je disais déjà, au début du secondaire, que j’étais dans un « trip mélancolie ».

C’est presque de la millencollin attitude. Sad air. 

Un peu de pathétisme ne me tuera pas.
J’écris de ma terrasse au soleil couchant comme si je n’y étais pas. Les gorgées de vin ont bien meilleur gout en pesanteur… car la nostalgie fait le poids, y a pas à dire. Se refaire Paris, la larme de vin au verre, le motton de poil de chat à la gorge, c’est comme quitter le carcan pour me replonger dans un autre.
Un carcan prémoulé, encore chaud d’espoirs de plus de temps, de plus de vie, de plus d’art de larmes.
Je viens d’entrer au musée de la nostalgie, et je me découvre dans les toiles que je perce. Au jour le soir, je cours comme jamais, je suis bien.
L’accent sent le déjà-vu, le déjà-senti par procuration. Un autre moi, celui que tu n’as pas connu, s’élançait vers toi sans le savoir, vers où tu es maintenant dans ces vers qui nous réparent.
J’ai plié la distance en quatre et l’ai glissée entre deux mots. La trouveras-tu? Moi, je l’ai déjà et perdue et reprouvée.
Je cherche l’ivresse parisienne mais ne trouve que pas. Il ne suffirait pourtant que d’un peu plus de mal de vivre, de solitude, de tourment. Un pas et j’y suis, pourtant, presque revenue. J’arpente en pensées et rubans toutes les rues menant au malaise, au malaise de ne pas y être justement.
J’embrouille sans doute tout mais ce mal-être nécessaire. M’as-tu trouvée errante et trainante, comme un Gil francophone mais tout aussi décalé? Non, car j’avais déjà fui la salle de ciné. Et toi, tu n’y étais pas, car tu vivais en chair et en prose.
Et moi, je ne vis qu’un poème, un poème comme pari.