Archives mensuelles de novembre, 2013

Le premier jour de l’hiver, j’ai eu une tempête.

Quand je me suis réveillée, l’appartement était tout blanc et froid. Le bonhomme de neige à mes côtés avait été éparpillé au vent. Mon corps était sans marque, comme par magie. Mais ma tête était dans un blizzard terrible.

Je me suis levée, enroulée de flanellette, et j’ai mis mes mitaines rouges d’enfant. J’ai déterré Ce Chat, qui s’était creusé un fort sous la couette. Il y avait des glaçons de pris dans ses moustaches, mais il était intact, c’est-à-dire miaulant. Sa plainte se perdait dans le vent.

J’entendais un crépitement de radio dans mes oreilles piquantes : travail… fermé… aujourd’hui… maison… dodo. Mais mon appartement enneigé, je devais trouver mon cocon ailleurs, à l’extérieur, le temps de laisser fondre tout ça. Braver le froid qui déchire et met à nu. Perdre mes pensées une à une au rythme de mes orteils. Trouver une sorte de paix dans la grisaille miroir pour pouvoir mieux affronter le blanc perçant, ici, en dedans.

Aller voir ailleurs où je suis.

J’étais dans le bus, surchauffée. J’étais dans un café, branchée. J’étais dans une salle de spectacle, bondée de bonshommes sans neige. J’étais dans une pizzeria, cassée. J’étais sur le trottoir, errée. J’étais dans un salon de thé, noyée. J’étais dans un bar, empêtrée. J’étais dans le métro, trouvée.

Oui, j’étais là, dans le métro. C’était bien moi que tu as vue derrière la vitre plastique, celle sur laquelle j’ai cogné de ma mitaine rouge. Oui, cogner m’a réveillée. Oui, tu m’as souri, tu m’avais reconnue. Oui, je m’en allais chez moi.

La tempête s’était calmée. J’avais eu une tempête.

Je suis rentrée dans mon appartement nickel. La neige avait fondu avec le chauffage au fond. Il restait des flaques d’eau que Ce Chat léchait avec application. J’ai enlevé mon manteau et mes mitaines rouges pour poser mes doigts et mes cuisses aussi rouges dans les couvertures. Mes vêtements avaient été gris. Tout le reste de mon corps était blanc. Tout le reste de mon corps n’était pas de glace.

Le premier jour de l’hiver, il y a eu une tempête.

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1.
fleurs mauves en papier
comme nos deux coeurs chiffonnés
elles ne meurent jamais

2.
thé pour emporter
avec la foule excitée —
une pleine lune à boire

3.
pas encore de neige
fondue, mais ça sent déjà
les saisons passées

4.
these shoes were made for
loving — the dancefloor, and you
won’t look down on me

5.
les mots se bousculent
one step, two step — closer to
lines that are kept blurred

5,75
donne-moi des mots qui
sonnent, des mots qui réso-onnent
do

roses
i slip under the door, leaving
them to someone else’s care
as i don’t
mind
anymore

who’s left for me
tell me

as i wear ochre and black
every day that i’m walking
(through
a forest of skinned bodies)
naked
dead
(soul)

don’t talk to me i’m busy
mourning
i’m already in disguise
can’t you see?
i’m crying
silver
make-up
rivers

is it that
whoever drifted away from sight
is considered dead
by the whitest soul?
tell me ’cause
i’m innocent

and lost
tell me
who’s left for me
to cry for?
who’s left
to cry for
me?

i don’t care
i’m sipping tea, and
slipping rose petals under gateways
i’m going to walk through soon
when i had enough
of burying myself
under heaps of earth-
en ware

when i hit home
inside
my cry will let you all
know —
all.

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*** Oh, and here’s the link to today’s prompt at dVerse poets pub! We had to take the colo(u)r wheel, and play with colo(u)r symbolism. Believe it or not as my poem is sad, but I had a lot of fun including colo(u)rs into it. Make sure you check out on a few other poets’ contributions too!
By the way the picture was taken by me (and instagrammed) during a walk in Old Montreal. I wish I knew who made this beautiful doorart. ***