J’aime à accumuler des morceaux de vie, d’envies, de vides, et à les retrancher de ma vie comme de vulgaires voyelles qui se suivent de trop près.
Chaque journée est une suite de moments découpés dans un carton de couleur, puis collés sur un fil qui fuit.
Ensuite les morceaux glissent et prennent le bord de la nuit.
A-t-on jamais une impression d’ensemble d’une vie, ou n’a-t-on au final (de chaque jour ou du total) qu’un ramassis de points saillants et faillants?
La seule façon d’en empreinter le sens ne reste-t-elle pas d’en concentrer l’essence dans une seule phrase, du type réponse à la sacro-feinte question « Qu’est-ce que tu fais dans la vie »?
Le scrapbook demeure selon moi la meilleure version qu’il me soit possible de donner de mon existence.
(Entrecouper ici cette lecture d’une paire de ciseaux – d’une visite de votre fil Twitter – d’un carton à défaire qui vous appelle – d’une phrase quelconque.)
Je ne fais ici que lancer des boulets dans les airs en espérant qu’ils retombent sous forme de confettis.
Finalement, les phrases et les phases se succèdent et se ressemblent peut-être, mais je ne m’en souviens pas.
Qu’est-ce que la constance si tous les paramètres ont déjà changé alors que j’avais le dos déjà détourné?
Chercher à se découvrir est peut-être voué à l’échec, surtout si on veut tirer sur le bout qui dépasse pour en extirper plus.
Ce qui sortira du sable pourrait n’être déjà plus, pas plus qu’un reste sans intérêt de nulle part.
L’amoncellement de morceaux est une course sans fil d’arrivée, un tricot sans fil d’achevée.
Une chance que j’aime la course.
(Placer, en point final de cette lecture d’un moi qui vient de disparaitre, une photo d’un moment beaucoup trop souriant – une citation sous forme de haiku fuyant – ou encore une parole de chanson qu’on a eu l’illusion de comprendre pendant un bref instant.)
Spécialement bien écrit, celui-là. Beaucoup d’assonances et d’allitérations qui laissent un goût juteux d’après lecture… 🙂
Merci! Miam, des petits monceaux bien juteux…