Pour un moment l’heure n’a plus d’importance. Pour un moment les voix âcres, les récris, les redites sur fond d’images se sont tus.

Le temps est mort. Ou plutôt, le temps est comateux.

Une phrase me frappe et je tremble, elle me trempe – que c’est étrange – dans les souvenirs d’une autre :

« [I]l n’est pas nécessaire de trouver écho en quiconque pour exister » (Cheval-Marcel)

Je me sens étouffée par cette grandeur. Il ne me reste qu’un filet d’air qui ne repassera pas si je ne m’en saisis pas sur-le-champ. Vite, j’étouffe. Mon individualité.

Il y a dans cette salle des chérubins de plâtre, certains tachetés ou écaillés, et des fleurs, gorgées de rosée ou décrépites, la tête en bas. J’y vois autant de tombes, autant de personnes vivantes, autant d’étapes dans une vie que de finis glacés de la douleur mate. 13. Un nombre qui ne me dit pourtant rien de plus que l’année à venir.

Peut-on jamais revivre le voyage d’une autre? L’entendre puis le lire, le relire, jusqu’à le ressentir? Peut-on s’approprier une expérience autre, de la même façon qu’on en oublie certaines des nôtres en d’autres? Au-delà des circonstances, les récits ne sont-ils pas – partiellement, du moins – interchangeables?

J’ai la vaste impression que notre écho se réverbère toujours quelque part – qu’il s’évertue parfois à se taire longuement pour mieux rebondir. Qu’il ne nous renvoie plus notre voix exacte. Qu’il passe par les beautés du monde – fanées ou non – pour nous revenir par un autre chemin.

Parfois, par quiconque.

Parfois, par une amie chère et son art qui frappe droit dans mille coeurs.

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