J’ai une bosse de bison.
Une colonne de dinosaure plié, une vertèbre crapoteuse.
La pose et moi, nous faisons deux.
J’ai la toison brune qui me reboucle dans les yeux, le grain de blé dans l’oeil, la baboune avachie.
J’ai la peau fendante, la tête à angle bas, les griffes qui pognent dans le clavier –
j’exulte dans ce détail qui fuit, ce point trop tiré du i.
J’ai les sabots qui se cognent ensemble dans l’air et ça n’est pas visible.
J’ai la queue à pics qui virevolte dans la cuisine et seul le prélart craque.
J’ai le corps qui se déploie en plus d’une image seconde –
je suis mobile.
Chaque encyclopédie ne porte plus vraiment ma photo; je disparais vite
et laisse plus d’une trace.
Alors je veux qu’on se souvienne de moi comme des points à relier,
une Haute-Gaspésie en deltaplane lourd.
1. le patriotisme ordinaire
marteler de la gauchetière des deux sciatiques
ô canada
pas assez fashionable mais trop late
terre de nos aïeux
kazhaks, etc., 64 pays non nommés dans les deux langues
ton front est ceint
comme dans ceinture bien sûr avais-tu déjà vu ce mot
sauras-tu expirer sans qu’on te reproche d’imiter
moi je n’expire même pas
de fleurons glorieux
car ton bras posera la feuille là, tout juste entre le coeur
et la tête
ton corps droit sait porter l’épée
mieux qu’un quelconque bénévole adulé gauchement
dans deux jours tes oreilles ouvrables
la litanie des femmes seules
te concernera, ô travailleur
we stand on guard
dans le malaise des jambes droites
combien de citoyens expireront
sur ce tapis
en fioritures?
2. le régime ordinaire
douze visages nommés dans cinq langues
pays laissés aux maris, etc.
nos fronts d’argile nos rêves fashion
nos tissus dégringolants
bien sûr on pouvait toutes transmettre ce qu’on ne voulait pas
saurai-je sécher mon sourire
riquissimo
vos aloès rouges-gorges
vos odeurs de croix
je ne chanterai pas sur le trottoir cette fois
j’applaudirai
comme si vos vies en dépendaient
la litanie des femmes se trouve ici
possibilité d’être partout heureuse mais en femme
ô canada
de shake à tout prendre
terre des aïeux sur les joues à deux doigts
terre de livres à perdre
la main sur le livre saint jurer
pas comme dans juron bien sûr vous aviez compris
16 ans, toutes mes dents dehors
et la sagesse à moitié à l’air,
à chaque pas la taille basse en marteau-piqueur
et les seins strappés en une seule poitrine
faussement dure,
laissant dans sa trainée
une poudre de mia
je m’en allais à la maison je m’en allais à la perte
d’un bout de moi
quand les poules auront des
orgasmes dans mes oreilles parfaites
quand les gars cesseront de
remplir leurs briquets de pets je
serai belle;
plus le monstre auquel on lance
des jetons de casino
dans sa propre tête
va jouer
dans le trafic
poudrée en parchemin
roulée
pour l’instant je craque
claque grasse dans’ face
que je suis donc laitte et
que j’ai donc ben envie de biscuits
peut-être m’en allais-je plutôt au gain
d’un bout de ventre
de mon futur diplôme
de bonne vivante avertie
verre de lait, biscuits
après le dur gardiennage
redevenir enfant
2 heures, 24 biscuits et 1 bleu nuit
plus tard, le mal de ventre
comme quand je m’étais dit
« plus tard, le mal de ventre »,
avec les affres des tampons-cactus
prises
blanc plâtre ou blanc souris
toutes griffes dedans
plus tard, les larmes
pour la part
de gâteau
des anges qui ne me revient pas.
ce que je crache a des ailes, a du ciel,
a du mont en neige
non je ne suis pas enceinte d’un playtex
noir de monde,
ni d’une boite de biscuits
oblongue
et d’un ange short cake
mais ce que j’ai au ventre
est dur pour vrai
sous anesthésie
on peut enlever bien des choses
même quelques biscuits
pris dans un appendice.
je le sais, le médecin me l’a soufflé
en même temps que mon guts
je ne m’en vais plus à ma perte j’y rentre
et j’ai déjà quelque chose
de moins que tout le monde
***
Ce poème a été écrit à partir de deux listes d’objets perdus énoncées dans des sketchs des Appendices ici et ici (Objets perdus 2 et 5… à voir!). Je voulais essayer de passer par-dessus le caractère absurde de ces objets et les introduire dans un poème racontant une histoire qui fait sens (en elle-même et avec l’absurdité des objets). Voici les listes rassemblées :
x deux poèmes sur le thème des biscuits
x un cactus dans le plâtre
x les larmes de Michel Dumont quand qu’y a appris que La Part des Anges ça revenait pas
x une impression de déjà vu (x 2)
x des outils habillés en putes
x de la poudre de hip-hop
x une brassière monoboule
x un certificat de l’académie du bon vivant
x des jetons d’un casino qui existe juste dans la tête d’un monstre
x un CD d’orgasmes de poules
x un vieux parchemin sur lequel c’est écrit « t’es laitte! »
x un briquet rempli de pets
***
